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Annabelle à 40 ans

http://www.carriegoller.com/images/wpeC5.jpgBonjour, je vous présente Annabelle qui un jour sera une grand mère d'exception mais aujourd'hui, Annabelle n'est qu'une femme accrochée à la vie par la force d'un amour qui ne lui  laisse pas le choix. Celui des autres. Le plus bel amour, celui qui ne s'épuise pas...l'AMITIE...


Annabelle aurait bien aimé trouver la force de sortir de chez elle mais en quelques heures à peine, le monde extérieur lui était devenu une épreuve insurmontable.
Elle préférait le creux de la télévision dont elle pouvait changer d'un seul clic l'étendue et la teneur du superficiel qu'être confrontée une fois de trop au vide intersidéral d'une population massée comme des porcs dans des tubes de résines mouvant au rythme des sonneries d'arrêts.
Comment avait-on pu  passer de la vie à la mort sans s'en rendre compte.
Observés dans ce même tram, on traçait presque l'évolution de la société sans pour autant répondre à cette question essentielle. Qu'est-ce qui s'était passé pour les gens se masquent d'autant d'indifférence et d'irrespect.
Annabelle n'avait pas envie ce matin de sentir les odeurs d'aisselles mêlées aux parfums bon marché.
Elle n'avait pas envie de voir la joie des enfants qui s'agitent d'impatience de sortir rire et courir, des ados narquois pensant qu'on est tous des cons et qui sont au plus proche de la vérité, des étudiants en plein partiels qui s'accrochent les uns au autres pour mutualiser leurs dernières forces, des jeunes mamans d'un autre monde et des autres, ces autres nous sans passé ni avenir, les autres nous au milieu des mondes, des zombies inter-âge, inter-projet, inter-face au passé et avenir....
Non Annabelle ne voulait pas avoir à se ranger dans la catégorie des autres aujourd'hui, pas plus qu'elle ne le voudrait demain.

Le vide qu'elle ressentait au fond d'elle trouvait écho sur chaque visage qui concourait d'inexpression et de mort, tout ces "autres" dont on arrive pas, même en forçant, à imaginer en quelque minute quel est son personnage. Quel est son prénom ou le son de son rire...
Ces autres qui semblent tellement vides que l'on arrive même pas à imaginer leur intérieur, on se dit même que lorsqu'ils cuisinent, aucune odeur ne doit s'échapper de leur poêle...
Annabelle voyait les gens comme un troupeau de porcs dans un wagon filant vers l'abattoir, tous bien appliqués à s'ignorer, se toiser, s'imposer les uns aux autres.
Son désespoir d'amour lui avait ouvert les yeux pour la projetée dans l'enfer du réel qui prenait corps dans chaque situation banale de la rue
les gens ressemblaient à des zombies et définitivement NON, elle ne pourrait pas aujourd'hui.
Elle parlait mais on ne l'entendait pas, c'est comme si son entourage disposait du même programme informatique déclanchant les mêmes réflexes, les mêmes phrases, ça la rendait sourde.
Ces mêmes mots, ces mêmes conseils, ce même amour faisant toujours plus écho à ce vide.

C'est l'amitié qui maintenait Annabelle en vie, être avec ses enfants, sa soeur et ses amies étaient ses seuls moments de repos, les seuls moment où il y avait encore cette magie de vivre.

Les mieux présents étaient bien entendu celles et ceux qui se reconnaissaient en elle et qui pour la plupart avaient dû dans son état avaient dû se battre seuls, "elle qu'on croyait forte..." elle n'avait pas idée du nombre de souffrances qui lui étaient inconnues et les gens se trompaient, ELLE n'aurait jamais pu affronter ça toute seule...
Là elle se sentait coupée en deux de la tête aux pieds et marchait comme dépossédée de son unité de temps, de lieu et de corps et d'esprit...

Si Annabelle avait été seule, à l'intant présent elle serait en train de repeindre le 7ème ciel d'une lumière qui ne pourrait pas lui permettre de voir les images qu'évoquaient ses souvenirs.
Elle repeindrait le ciel d'une couleur propice à l'oubli.

Et si on avait ce choix là aux portes de l'éternité ?
Voulez-vous gardez les visages de votre ancienne vie et tout ce qui va avec
OU tout oublier ....
et si c'était ça l'enfer ?
la mémoire
se souvenir du bien comme du mal
et si c'était ça notre pouvoir
ce choix d'évoquer nos bons ou nos mauvais souvenirs.

Annabelle téléphonerait pour signaler son absence et s'enroulerait dans sa coquille pour dormir et n'espérer aucun rêve....
Annabelle appellait l'oubli comme une mère cherche son enfant perdu dans la foule dense.
Annabelle se disait que pour demain, elle avait des projets et qu'après elle verrait.

Quand à moi, je vous embrasse



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